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L'origine des départements bretons

En 1789, quelques semaines après la chute de la Bastille, les révolutionnaires achèvent d'abattre l'ancien Régime en démantelant les anciennes circonscriptions aux limites enchevêtrées. Dans un souci de simplification et avec la volonté de rapprocher géographiquement le citoyen des institutions, il est rapidement décidé de créer de nouvelles circonscriptions, uniformes et découpée rationnellement. Mais quelle circonscription établir ?

Très tôt, au début novembre 1789 le débat opposent les départementalistes, favorables à des circonscriptions moyennes au nombre de 75 à 120 qui marquent une rupture réelle avec les anciennes provinces, mais aussi, supposait-on, avec le pouvoir de la noblesse et les députés provincialistes qui se méfient d'un Etat trop centralisateur, ou encore prémonitoirement de l'influence de Paris " qui devient un corps trop puissant et redoutable aux autres départements du royaume ". Ces derniers proposent une division en 24 départements reprenant le plus souvent les limites des anciennes provinces. Lorsque celle-ci, comme la Bretagne, apparaît trop étendue, on envisage de la subdiviser en 7 ou 8 départements dont les délégués se réuniraient tous les deux ans comme le faisaient les Etats de Bretagne. Cette recherche d'un équilibre des pouvoirs n'aboutira pas. La députation bretonne elle-même se prononce le 8 novembre par 33 voix contre 15 pour des départements indépendants les uns des autres. Mais les députés bretons se réservent le droit de prendre en considération les propositions provincialistes provenant d'autres territoires. Pour lever ces atermoiements, les partisans de la départementalisation concèdent qu'on pourra découper les futurs départements en respectant les frontières des anciennes provinces. Le débat fut écourté le 11 novembre sans qu'on ait entendu l'opinion de tous les provincialistes. La détermination de Thouret et le soutien de Mirabeau entraîna le vote par la Constituante du découpage de la France en 80 départements environ. La province disparaissait car, croyait-on, elle était le siège de la défense des privilèges de la noblesse et un obstacle à l'expression du pouvoir démocratique représenté par la future assemblée nationale.

Conformément aux décisions de la Constituante, la Bretagne fut divisée dans ses propres limites. Les limites des départements de Rennes et de Nantes se reprirent les limites qui étaient déjà communes à la généralité de Bretagne et aux évêchés de Rennes et Nantes. Seules, les Marches au sud de la future Loire inférieure donnèrent lieu à un partage. Les Marches avantagères furent attribuées à leur province d'origine sans tenir compte de leur appartenance à un évêché extérieur. Les 14 paroisses des Marches communes à la Bretagne et au Poitou furent partagées entre Nantes et Fontenay.

Avant même que ces tractations ne soient terminées, une affaire plus importante allait diviser les Bretons. Les Malouins constatant l'élaboration du projet d'une Bretagne à cinq départements défendirent la création d'une sixième circonscription dont Saint Malo aurait été le chef lieu. Envoyant des délégués à Paris, Saint Malo obtint l'attention du Comité de constitution. Son projet respectait davantage les anciens évêchés très ancrés dans les esprits puisque trois départements reprenaient assez fidèlement les limites du Vannetais, de la Cornouaille et d'un regroupement Léon-Trégor, et intégrant la coupure linguistique . L'équilibre côte nord/côte sud étaient mieux respecté et les distances moins grandes. Néanmoins, ce projet mal soutenu par d'autres villes à qui il était également favorable comme Brest et surtout peu pris en compte par les députés bretons fut rejeté en janvier 1790.

Le principe des cinq départements n'était pas encore définitivement arrêté que déjà les marchandages et les échanges de paroisses débutèrent. Ainsi les limites départementales qui devaient suivre le plus souvent possible les cours d'eau et autres limites naturelles s'en écartèrent rapidement pour satisfaire les intérêts des villes en concurrence. La Rance, par exemple, devait être la limite entre le département de Rennes et celui de Saint Brieuc. Mais rapidement Saint Malo exigea et obtint 4 paroisses côtières à l'ouest de la Rance où se trouvaient ses chantiers navals et une partie du recrutement de ses équipages. En contrepartie, Dinan finissait par obtenir 11 paroisses rurales sur la rive est du fleuve. Un autre échange eut lieu entre trois départements. Rennes ayant obtenu le port de Redon dépendant le l'évêché de Vannes mais essentiel pour son approvisionnement, elle concéda en échange Chateaubriant et 20 paroisses à Nantes qui à son tour rétrocédait la Roche Bernard et l'embouchure de la Vilaine à Vannes. Enfin Quimperlé rattaché à Quimper parvint à entraîner avec elle deux paroisses de sa zone à l'Est de l'Ellé tandis que Vannes recevait en compensation 4 paroisses de Haute Cornouaille.

Ce découpage, éloigné des limites traditionnelles des évêchés bien ancrés dans les esprits, obligeait à faire des choix contestables. Le principe d'un découpage géométrique en fonction d'une distance d'une journée de marche au chef lieu fut globalement respecté, mais on constate qu'en réalité, c'est un critère plus moderne et plus géographique, celui du poids et de l'intérêt des villes qui présida aux délibérations. Depuis lors les départements ont connu une stabilité étonnante. Pourtant, les difficultés actuelles liées à leur découpage ne manquent pas. La position ubuesque de Redon est la plus célèbre, mais la situation de Quimperlé, ou la lenteur de l'axe routier du Centre Bretagne en sont également des conséquences.

 

 

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